En Gaec depuis 14 ans à Plumaudan dans les Côtes d’Armor, Anthony et Thomas entament en 2016 une conversion AB afin de réduire la dépendance aux intrants et améliorer la valeur ajoutée de l’exploitation de 135 ha. Un choix assumé malgré les difficultés économiques que la filière biologique traverse actuellement.
En 2015, après l’arrêt des quotas, la crise laitière impacte fortement les performances économiques du GAEC avec un « effet ciseau » prix de vente / coût de revient. “Plus on produisait de lait, plus on perdait d’argent” souligne Anthony. Thomas s’interroge aussi
sur la réduction des produits phytosanitaires. Dans un environnement agricole local plutôt orienté vers les volumes, la filière biologique en pleine croissance s’est présentée comme une orientation attractive et ambitieuse.
Depuis, la structure a fait évoluer son système sans agrandissement des surfaces exploitées. La production de lait a bien sûr baissé avec une livraison de 550 000 litres sur l’année écoulée, mais le lait reste l’activité principale avec 80 VL sur une SFP de 77 ha environ. Le reste des surfaces est consacré à des cultures de ventes céréales protéagineux ainsi que légumes industrie (pomme de terre, haricots, petits pois).
S’adapter à l’aléa conjoncturel
Si le lait reste l’activité la plus stable grâce aux volumes, à la qualité et un prix payé supérieur à 500€/1000 l sur la dernière clôture, il en va différemment pour l’activité végétale.
Depuis quelques campagnes, à l’aléa climatique toujours fort en bio vient s’ajouter un contexte commercial très incertain. Les difficultés concernent la filière “alimentation animale et humaine” dans son ensemble et les prix de vente des cultures sont fortement impactés depuis 2022.
Afin de limiter les déconvenues climatiques et commerciales, la surface de cultures de vente, et en particulier celles destinées à l’alimentation humaine, est temporairement réduite au profit de cultures fourragères qui contribuent à l’alimentation du troupeau
laitier. Objectif : produire un peu plus de lait et maintenir une bonne autonomie alimentaire. “Après une décennie de croissance ininterrompue, le bio connaît un passage à vide.
En attendant de retrouver un équilibre par la baisse de la production et/ou par la reprise de la consommation, il faut s’adapter, modifier les assolements, revoir l’alimentation du troupeau, rester en veille sur le marché de grandes cultures”.
Diversifier les activités pour plus de résilience
Afin de conforter leur rentabilité, les exploitants achèvent actuellement la réalisation d’un séchoir. Une chaudière à plaquettes alimentée par des ressources locales fournit la chaleur nécessaire à sécher du foin en grange pour l’atelier lait, mais également des
céréales en cellule de stockage à plat.
Ce nouvel équipement permet de réceptionner, nettoyer et mettre aux normes de commercialisation les grains biologiques issus de la ferme mais aussi des environs, en prestation de service. Le besoin de séchage pour les cultures biologiques (protéagineux,
céréales, sarrasin…) est fort.
“Le coût de l’énergie et des frais de séchage devient un facteur d’arbitrage dans le choix des cultures, ajoute Thomas. Maîtriser la mise aux normes des grains bio permet de mieux les valoriser.”
Certaines cellules du séchoir, quand elles sont libres, peuvent également recevoir du bois plaquette, voire du bois bûche en collaboration avec une Scic (Société coopérative d’intérêt collectif) locale. Le séchoir permet de réduire les délais entre la production et la livraison, pour une meilleure adéquation offre /demande, sur une activité où la consommation annuelle est très fluctuante. Cet investissement conséquent permet aux exploitants de renforcer la résilience de l’exploitation face aux aléas.
Lucides sur la situation actuelle de la filière bio, Thomas et Anthony restent raisonnablement optimistes. Ils se projettent dans une filière biologique plus concurrentielle et volatile demain. S’adapter, diversifier les productions, renforcer l’autonomie alimentaire et énergétique, rechercher de la valeur ajoutée… sont les leitmotivs des deux associés.
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