Nous allons revoir ensemble quelques rappels et réflexes à avoir quant à l’analyse de votre avis d’imposition.
Qui doit payer la CFE ?
Parmi les définitions que l’on peut glaner sur internet, celle du Bofip est particulièrement savoureuse « Les personnes et activités passibles de la cotisation foncière des entreprises (CFE) ne sont effectivement imposées à la CFE que si elles ne bénéficient pas d’une exonération. »
Comprenez : toutes les entreprises par défaut SAUF si elles bénéficient d’exonérations. La notion d’entreprise est traitée avec son prisme le plus large : toute personne physique ou personne morale, quel que soit leur statut juridique dont l’activité est exercée en France, avec un caractère habituel (de manière répété) et non salarié.
Avec un champ d’application si large, les exceptions habituellement tant redoutées des professionnels du droit sont pour une fois les bienvenues.
- Sans être exhaustif voici la liste des principales entreprises exonérées :
- Location ou sous-location d’immeubles nus, à condition qu’elle génère un chiffre d’affaires ou des recettes brutes hors taxes d’au moins 100 000 €. En revanche, la CFE ne concerne pas la location et sous-location d’immeubles nus à usage d’habitation. Cela exonère de fait les particuliers qui déclarent moins de 100 000 € de recettes sur leurs déclaration N°2044 (revenus fonciers).
- Location ou sous-location d’immeubles meublés, à condition qu’elle génère un chiffre d’affaires ou des recettes brutes hors taxes supérieur à 5 000 €. La CFE ne concerne pas la location meublée de certains logements qui font partie de la résidence principale du propriétaire. On voit donc que la notion d’entreprise dépasse le simple cadre professionnel car si vous faites du LMNP (location meublée non professionnelle) vous êtes amené à payer une CFE.
- Parenthèse : Certaines location saisonnières se sont vues affublées de taxe d’habitations récemment en Côtes d’Armor. Cela est dus à une remise en cause du caractère permanent de l’activité économique et que par conséquent les propriétaires pouvaient profiter de leurs immeuble une partie de l’année les transformant de fait en résidences secondaires. A ce jour l’administration fiscale ne s’est pas encore prononcée mais il paraitrait défendable d’en diminuer la CFE en proportion puisqu’il ne s’agirait plus d’une activité économique.
Il existe des dizaines d’autres cas d’exonérations comme celle pour les SCOP, les VDI, certaines coopératives agricoles ou pécheurs mais allons faire un zoom sur 2 activités.
Le cas des holdings et la notion de doctrine fiscale :
Mais l’exemple qui illustre le mieux le travail complexe d’un praticien du droit (qu’il soit comptable ou fiscaliste dans notre cas) est le suivant : le cas des holding pures. A première vu le Bofip nous dit :
« La gestion de son propre portefeuille de valeurs mobilières par un particulier constitue une activité relevant de la gestion d’un patrimoine privé et n’est pas, à ce titre, imposable à la cotisation foncière des entreprises » (BOFiP-IF-CFE-10-20-20-30-§ 10-12/09/2012).
Mais une holding est une personne morale et non un particulier : qu’en est-il donc pour les holdings pures (=passives) ? l’administration ne le précise pas réellement, une position dangereuse pour la sécurité fiscale des entreprises. Quand la loi n’est pas assez précise il faut se tourner vers une autre notion génératrice de droit : la doctrine fiscale. La doctrine est l’étude des travaux juridiques destinés à interpréter le droit. En exemple nous allons nous appuyer sur l’interprétation de la revue fiduciaire de 2014 qui rappelle que :
« La plupart de ces décisions, souvent après avoir souligné que la holding ne se livrait pas à une activité de gestion de valeurs mobilières pour le compte de tiers, indiquent que l’Administration n’avait pas établi que la société ait, sur les titres détenus, « accompli des actes outrepassant le simple cadre de la gestion de son patrimoine privé » qui auraient caractérisé une activité professionnelle (TA Toulouse 16 juin 1998, n° 95-2008 ; TA Lille 18 mai 2000, n° 97-812 ; CAA Bordeaux, 26 mars 2002, n° 99BX02069 ; TA Paris 14 novembre 2006, n° 01-1470).
Il est intéressant de noter deux choses :
- La première est que non vous n’avez pas à payer une CFE si vous possédez une holding passive qui ne fait que de la gestion de patrimoine privé selon cet article. Donc si par inadvertance vous en payez (ex : la société étant devenue passive en cours de vie) n’hésitez pas à le signaler aux impôts pour être exonéré.
- La deuxième concerne les dates de l’arrêté (2002) qui sont antérieures à la mise en place de la CFE. L’article site en effet des décisions du conseils d’Etat qui dates de 1976 sur les Patentes, une taxe disparue dans les années 1970. Il est donc intéressant de noter comment, par l’intermédiaire de jugement et de positions prises par l’administration au fil des années, une taxe même disparue peut encore produire des effets juridiques.
Les résidences services :
Mais la doctrine fiscale peut néanmoins changer de position. Tel va être le cas pour les locations en cascades en 2024. En effet les bailleurs de locaux ne fournissant pas la prestation d’hébergement étaient jusque là exonéré de CFE mais cela ne sera plus le cas. Cela concerne principalement les résidences avec services, notamment celles financées par des particuliers et gérées par des sociétés spécialisées (résidences services pour étudiants ou personnes âgées ainsi que les résidences de tourismes) qui devront prochainement acquitter une CFE.
Enfin quelques rappels
La base d’imposition de la CFE et déterminée par la valeur locative des biens immobiliers utilisés par l’entreprise. Cela signifie donc que vous aurez une CFE par établissements avec un taux potentiellement différent puisque ce dernier est déterminé par la collectivité du bien. Mais même si votre activité ne nécessite aucun local (ex : une activité de conseil) vous devez acquitter un montant minimum qui dépendra de votre CAHT N-2.
En cas de variation soudaine d’activité à la baisse, pensez à le notifier à l’administration fiscale pour demander exceptionnellement le recalcule de la CFE.
En conclusion, la CFE est une taxe qui est un bon exemple du droit fiscal Français : dans une majorité de cas son application ne laisse pas de doutes mais dans un certain nombre d’autres il est nécessaire de creuser profondément dans la documentation pour y obtenir une réponse parfois changeante.
Quoiqu’il en soit, si vous avez un doute n’hésitez pas à en parler à votre comptable.
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